La lutte contre le choléra fait débat en Haïti

Plusieurs experts dénoncent la stratégie vaccinale mise en œuvre après l’ouragan Matthew. Très médiatique, mais peu efficace, selon eux.

C’est la campagne de vaccination la plus vaste jamais lancée en Haïti contre le choléra, mais elle fait déjà polémique. Plus de 800 000 personnes ont été vaccinées entre le 8 et le 16 novembre dans les régions du sud de l’île, les plus touchées par le passage de l’ouragan #Matthew début octobre.

Or, un groupe de médecins haïtiens et d’experts internationaux conteste l’efficacité de cette campagne vaccinale. « Ma crainte, c’est qu’on ait recherché l’effet médiatique plutôt que l’efficacité sur le terrain », explique au Monde le professeur #RenaudPiarroux, de l’université d’Aix-Marseille, invité mi-novembre à un symposium sur le #choléra organisé par l’université Notre-Dame d’Haïti.

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#Infectiologue réputé, il avait, le premier, mis en évidence la responsabilité des casques bleus népalais de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (#Minustah ) dans l’introduction de la maladie en octobre 2010. Après une longue période de dénégation, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a récemment reconnu la « responsabilité morale » de l’#ONU dans l’introduction de l’épidémie, qui a tué plus de 9 000 Haïtiens et en a infecté près de 800 000, à la suite du violent tremblement de terre de 2010.

Précipitation

Les signataires d’un « plaidoyer pour réorienter la campagne de vaccination » mettent en cause la stratégie adoptée, la précipitation et le manque de mesures d’accompagnement consécutifs à l’épisode cyclonique Matthew. Parmi leurs griefs, le choix d’administrer une dose unique de vaccin. « Tous les spécialistes et les textes disponibles, y compris sur le site de l’Organisation mondiale de la santé [#OMS ], mentionnent la nécessité de réaliser la vaccination en deux prises, or la campagne a prévu une dose unique », regrette le docteur Jean-Hugues Henrys, doyen de la faculté de médecine de l’université Notre-Dame.

« Selon une étude réalisée au Bangladesh sur 200 000 personnes et publiée par le New England Journal of Medicine, l’efficacité du vaccin oral contre le choléra à dose unique n’est que de 40 % sur six mois et il est inefficace chez les enfants de moins de 5 ans », insiste le professeur Piarroux. Avec deux doses, l’efficacité monte à 65 % pendant trois ans. Pour les signataires du plaidoyer, il eût été préférable de vacciner à deux doses moitié moins de personnes dans les zones les plus menacées et d’accompagner la vaccination de campagnes de sensibilisation sur les règles d’hygiène, l’utilisation d’eau potable et l’assainissement.

Ils craignent que la campagne actuelle ne soit contre-productive en incitant la population à baisser la garde en matière de mesures d’#hygiène. C’est ce qui s’était produit en 2013 après une campagne de vaccination à Petite-Anse, un quartier du Cap-Haïtien, la deuxième ville de Haïti. Se croyant protégées à vie, nombre de personnes vaccinées ont négligé les règles d’hygiène et Petite-Anse est resté le principal foyer de choléra du Cap-Haïtien.

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LE MONDE | | Par Jean-Michel Caroit (Port-au-Prince, envoyé spécial)

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