Cybersurveillance : l’homme qui a dit non au business avec Bachar al-Assad

C’est l’histoire d’un “homme ordinaire qui se trouve devant une situation extraordinaire”. En citoyen, James Dunne a eu un simple “cas de conscience”. Employé chez Qosmos, une société française de surveillance en affaire avec la Syrie de Bachar al-Assad, l’Irlandais n’a pu accepter l’insoutenable. Le Printemps arabe, la répression, la complicité de tortures. Dans son modeste appartement de la banlieue parisienne, l’homme nous a reçus longuement, en exclusivité, entre deux livres de philosophie et une guitare posée au mur. Il révèle ici être l’une des sources à l’origine de la plainte de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), qui a provoqué l’ouverture en avril 2014 d’une information judiciaire du pôle Crimes contre l’humanité du parquet de Paris. Entretien.

Le Lanceur : Êtes-vous un lanceur d’alerte ?

James Dunne : Ma réponse va surprendre un petit peu : non, je suis un citoyen qui a lancé une alerte. C’est-à-dire quelqu’un d’ordinaire qui se trouve devant une situation extraordinaire. Ce terme de “lanceur d’alerte”, bien qu’il soit nécessaire afin d’avoir un statut qui protège, est une forme de piège. Ce n’est pas un métier, ce n’est pas un club. Je me suis trouvé dans une situation que je n’ai pas créée, que je n’aurais jamais imaginée. Le citoyen s’est trouvé là et a agi. Mais ce n’est pas quelque chose que je veux voir coller à ma peau jusqu’à la fin de mes jours. Un véritable lanceur d’alerte laisse quelques plumes et ne cherche pas à tirer un bénéfice de ses actions. C’est bien que ce soit ainsi, sinon ce serait un marché de lanceurs d’alerte.

Vous avez été rédacteur technique chez Qosmos de 2005 à 2012, une entreprise française à la pointe du Deep Packet Inspection (DPI), la technologie qui permet de surveiller en profondeur toutes nos communications numériques. Quand comprenez-vous que votre société travaille pour Bachar al-Assad en Syrie ?

En fait, je me retrouvais à travailler sur des contrats de surveillance de masse avec un produit classé en “interception légale”. Ce terme, c’est un vrai coup de génie des marketteux. Mais ce n’est qu’en 2011, dans le cadre du Printemps arabe, que j’apprends dans la presse que certains de nos contrats impliquent des régimes dictatoriaux, notamment la Libye de Kadhafi et la Syrie de Bachar al-Assad.

 

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